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Introduction

Saint-Mathurin est un village de la Vallée d’Anjou, au bourg accroché à la levée de la Loire. Les recherches qui ont conduit à ce mémoire étaient au départ orientées vers l’étude de l’influence du fleuve sur la vie des riverains à Saint-Mathurin. Plus particulièrement, il s’agissait de déterminer l’importance de la population marinière, grâce à une étude statistique des professions des nouveaux époux dans les registres paroissiaux.

Cette préoccupation avait pour origine un mémoire de maîtrise de Bénédicte Dezanneau intitulé « Les hommes et la Loire à Saint-Clément-des-Levées. 1750-1789 », qui avait mis en évidence dans ce village de la Vallée distant d’une quinzaine de kilomètres, une très forte population marinière dans la seconde moitié du XVIIIème siècle 1. Cette forte population marinière était-elle une caractéristique de toute la Vallée d’Anjou ?

Nous découvrirons dans cette étude que les mariniers étaient peu nombreux à Saint-Mathurin, mais que le fleuve jouait un grand rôle dans la vie des riverains. D’abord, le village n’avait pu se développer que grâce à la construction d’une digue, ou levée, destinée à protéger la vallée des crues du fleuve. Ensuite, le fleuve balayait parfois le fragile rempart de la levée, provoquant dans la vallée de terribles inondations dont le souvenir restait longtemps vivace dans la population. Enfin, le fleuve permettait aux cultivateurs d’exporter leurs productions par bateaux.


Mais il est apparu au fil des recherches qu’autant qu’un village de la Vallée de la Loire, Saint-Mathurin était un village de la Vallée de l’Authion, dont les fréquentes inondations se faisaient plus souvent sentir que les terribles mais épisodiques colères du fleuve.

Ces inondations touchaient surtout les cultivateurs. Or il est apparu que les riverains étaient avant tout des paysans, Saint-Clément-des-Levées faisant exception dans la Vallée. Ces cultivateurs, à Saint-Mathurin, mais aussi dans les villages voisins de la Vallée (La Bohalle, Mazé, Corné, Les Rosiers, etc.) étaient pour la plupart appelés bêcheurs, à cause de l’importance du travail à la bêche. Ils pratiquaient des cultures intensives, ignorant la jachère, grâce à un assolement judicieux et aux grandes prairies de l’Authion.

J’ai donc complété mon étude des profession et de l’influence de la Loire sur les populations riveraines, par une étude de l’agriculture, des prairies communautaires et de l’aménagement de la Vallée de l’Authion. Puis je me suis orienté vers la forte densité de population et la grande valeur de la terre qui ont découlé des pratiques agricoles.

De plus, une part relativement importante du mémoire a été consacrée aux communautés d’habitants, grâce aux nombreux actes de délibérations conservés (une cinquantaine dans les archives notariales), et du fait de l’existence de deux communautés, La Marsaulaye et Saint-Mathurin, sur le territoire actuel de Saint-Mathurin.


Ce mémoire se veut le portrait d’une communauté d’habitants, en accordant une grande place à une situation géographique et à une agriculture très particulières, qui n’étaient pas propres à cette seule communauté, mais se retrouvaient dans les villages voisins du comté de Beaufort, à l’ouest de la Vallée d’Anjou, que j’ai plus particulièrement étudié.

1 Etude réalisée en 1990 par Bénédicte Dezanneau : Les hommes et la Loire à Saint-Clément-des-Levées. 1750-1789. Elle avait établi la part des mariniers parmi les époux, à travers les actes de mariage de 1750 à 1789, à 46% de la population totale. Un chiffre exceptionnel pour une paroisse ligérienne.