pageweb2 Table des matières
Page précédente
page suivante

2) L’Authion

La Loire terrorisait les riverains lorsque parvenue à hauteur de la chaussée, elle menaçait de submerger et de détruire la levée pour ravager la vallée. Mais en dehors des cas de ruptures des levées, la vallée n’était pas à l’abri d’inondations moins violentes mais très étendues : tous les ans, elle était partiellement submergée par les eaux de l’Authion.

Les inondations.

Le cours principal de l’Authion était le plus septentrional et correspondait au cours actuel. De la rive droite le Lathan venait se jeter dans l’Authion entre Longué et Beaufort, le Coesnon entre Beaufort et Mazé, et entre Mazé et Corné un autre cours d’eau, maintenant appelé ruisseau des Aunaies.

Leurs eaux se mêlaient à celles des nombreux ruisseaux ou mares de la rive gauche appelés “ boires ” : “ les boires ”, la “ Boire du Chêne ”, “ boire du Chardonnet ”, “ boire de Goislard ”, etc.

Ces cours d’eau de la rive gauche trouvaient leurs sources dans les infiltrations des eaux de la Loire à travers les levées (encore appelées “ renards ”) et de la nappe phréatique très proche de la surface.1 En 1788, une demi-boisselée du terrain destiné à la construction du presbytère de Saint-Mathurin “ est basse et sujette à être inondée par les sources de la rivière de Loire ”2 Encore aujourd’hui, lorsque la Loire monte, de nombreux habitants de la levée voient l’eau envahir leurs caves en contrebas de la levée, ou approcher de la surface dans leurs puits.


Aujourd’hui la vallée est assainie, et l’Authion canalisé. Mais au XVIIIème siècle, les inondations de l’Authion étaient une plaie pour les cultivateurs de la vallée. Chaque année les eaux débordaient sur les terres basses de la dépression latérale de la vallée.

Le “ Tableau de la Généralité de Tours ” de 1762-66 évaluait les parties basses inondées “ depuis Saumur jusqu’au delà de Beaufort et St Mathurin à plus de 12.000 arpents ” [7900 hectares] dont “ environs la moitié qui, dans les années plus sèches, peut servir de pacage ”3. Le mémoire de 1783, attribué à Aveline de Narcé, riverain de l’Authion, défenseur des communaux et promoteur du dessèchement de la vallée, parle, lui, “ des fréquentes inondations de la rivière d’Authion en Anjou, qui submergent plus de sept mille arpents de marais, & couvrent de ses eaux, une partie de l’année, près de dix à douze mille arpents de pré, ou de terres labourables. ” 4 Ces inondations touchaient donc de manière habituelle de très vastes étendues.


Les inondations étaient particulièrement importantes en aval de Beaufort, dans la partie la plus basse de la vallée, et la plus proche de l’embouchure de l’Authion dans la Loire.

D’après les chiffres donnés en 1816 par l’ingénieur Bétourné auteur d’un projet d’aménagement de la vallée, 81% du territoire de La Daguenière, et 78% de celui de La Bohalle était inondé par les plus hautes eaux de l’Authion, contre 23% à Saint-Clément, et entre 40 et 50% à Saint-Mathurin.5

L’hiver, entre Mazé, Brain, Saint-Mathurin et La Daguenière, ces eaux se répandaient dans un réseau compliqué de bras, boires, ruisseaux, mares ou affluents6. On rendait ces inondations responsables de la pauvreté des habitants et de leur mauvaise santé. Les représentants de Saint-Mathurin écrivaient vers 1787 aux membres de l’Assemblée provinciale que la plupart des habitants “ sont des pauvres très infirmes à raison de ce que le sol de la paroisse est un cloac dont les vapeurs infestent et occasionnent des maladies epidemiques ” 7. Cette description est sans doute exagérée, destinée à apitoyer les membres de l’administration, mais comporte une part de vérité. François Lebrun a étudié les variation saisonnières des décès à Beaufort entre 1690 et 1789. Il a noté une mortalité d’été et d’automne très forte, et un maximum des décès en septembre au lieu de mars ou avril habituellement. Il attribuait ces particularités à l’insalubrité de la Vallée d’Anjou, et au paludisme8.

Encore en 17989, Daillé, commissaire auprès de l’administration cantonale de Port-La-Vallée (Saint-Mathurin), rendait partiellement responsable de la mauvaise santé des habitants “ la stagnation des eaux de l’Authion, qui aux moindres crües, sortants de son lit par des voies qui lui sont étrangères, Trébouze, Gondouine et la Bande ; se rependent au midy dans la vallée, y submergent une immense quantité de prairies et de terres labourables et ne pouvant rentrer dans son lit, sont obligées de se consommer dans la terre en croupissant, ce qui cause chaque année la perte d’une immensité de bétail par la sanssue la maladie et la mort de beaucoup de personnes par l’exhalaison empestiférée ”. Le bras de l’Authion en question passait aux “ Gravelles ”, commune de Mazé, au nord de Saint-Mathurin. Sur une carte de l’an 12 il semble se perdre dans des communaux appelées “ Machelouze ”.10 Le document de 1798 le décrit comme anormal, mais ce ruisseau paraît un bras habituel de l’Authion d’après la carte de la forêt de Beaufort de 178511. Peut-être les travaux entrepris autour de 1774 ont-il rendu moins fréquentes les inondations par ces deux boires. 12

Les causes de ces inondations.

On ava nçait comme premières causes dénoncée des inondations la faible pente de l’Authion, qui limitait le courant et l’évacuation des eaux, et le reflux de la Loire en crue par l’embouchure de l’Authion près de Sorges.

Le reflux des eaux dans le lit de l’Authion était accentué par le débouché de l’Authion juste en amont des Ponts-de-Cé : là les eaux du fleuve s’élevaient, car la Loire perdait les 3/5e de sa largeur, et ces eaux, ralenties, refoulaient celles de l’Authion. Plus les eaux montaient, moins elles avaient de place sous les arches des ponts, d’où une forte différence de hauteur des eaux entre l’amont et l’aval des ponts lors des crues.13

Comme la pente était faible du nord au sud de la Vallée, mais aussi d’est en ouest (deux mètres de La Ménitré à La Daguenière), les inondations s’étalaient très vite dans toute la vallée sans rencontrer beaucoup d’obstacles.

Roger Dion soulignait quant à lui que les terres situées en bordure de la Loire sont favorisées vis-à-vis de celles qui bordent le lit de l’Authion. Ces dernières sont plus longues à s’assécher en raison de leur position déprimée, mais aussi à cause de terrains imperméables situés sous une mince couche arable.14


Les communautés de la vallée reconnaissaient toutefois que certains riverains avaient aussi leurs torts, et contribuaient aux inondations :

Les pêcheurs entravaient le cours de la rivière pour poser leurs filets en travers, les chasseurs construisaient des cabanes, avec de la terre que les grandes eaux rejetaient dans la rivière, ou des digues, pour retenir l’eau et faire venir les oiseaux. Pour faire rouir le chanvre (le faire tremper jusqu'à la décomposition de la gangue) les cultivateurs le mettaient dans l’Authion, couvert de terre pour qu’il pénètre dans l’eau, et rejetaient ensuite cette terre dans la rivière.15

Les problèmes liés au rouissage du chanvre et aux pêcheurs étaient les plus fréquemment abordés dans les textes. Aveline de Narcé s’en plaignit dans un mémoire sur l’Authion de 1783.16 Des règlements furent établis pour le rouissage du chanvre par la “grurie”(juridiction) des Eaux et forêts de Beaufort en 1725, 1763, 1774, 178817. Sans empêcher ces pratiques.

Les tentatives d’amélioration de 1721 à 1743.

1721-1728 : véléités de curage et création du canal de Champfleury.
Suite à une requête, en 1681 Colbert se fit présenter un projet pour assainir la vallée et rendre l’Authion navigable. Mais il recula devant le coût.
En 1721 une nouvelle requête avait entraîné le commencement de travaux, peut-être grâce à l’influence du cardinal Dubois, abbé de Saint-Pierre-de-Bourgueil depuis 171918.

On construisit le canal de Champfleury entre la grande boire appelée “ fosse de Sorges ” et le lit même de la Loire, pour faciliter l’écoulement des eaux de l’Authion19. D’autre part, le curage du lit de l’Authion fut entrepris avec l’aide de deux régiments (en 1722 tout au moins). Les habitants de la vallée avaient été requis par corvée pour ce travail.20

Mais commencés en 1722-23, interrompus par la mort de Dubois, repris mollement en 1727, ces travaux ne servirent pas à grand chose. Les régiments envoyés sur place pour curer l’Authion se contentèrent de rejeter les vases extraites sur les berges, et en quelques années la pluie et les inondations les rendirent à la rivière21.

Le curage s’accompagna d’une rectification d’une partie du cours de l’Authion : en 1744 l’assemblée des habitants de Corné se plaignit qu’en 1727-1728 “ le roi ayant fait faire un nouvel Authion au lieu du vieil qui serpentait en beaucoup d’endroits ” 30 à 40 arpents (20 à 30 hectares) de communaux avaient changé de rive (4-5 arpents au total d’après le procureur du roi).22 Il est difficile de dire si le nouvel Authion en question, qui s’étend sur plus de 6 kilomètres entre Corné et Brain23, et constitue maintenant le lit principal de l’Authion, est une création ex nihilo ou si l’un des bras de l’Authion a été aménagé pour drainer la majeur partie des eaux.


1732-1743 : le nouveau pont de Sorges.

A cette date la route menant d’Angers à la levée passait par le bourg de Sorges. Au sud du village un pont permettait de traverser l’Authion et de rejoindre le début de la levée24.

Une digue fut construite un peu plus à l’est, et un nouveau pont en amont de l’ancien fut achevé en 174325. Sur l’autre rive de l’Authion une digue fut construite jusqu'à la Levée de la Loire. Les travaux durèrent dix ans de 1732 à 1743.

Sous les arches de ce pont, des portes de bois empêchaient les eaux de la Loire de refluer dans l’Authion. Mais quand l’Authion était plus haut, elles permettaient l’écoulement de ses eaux dans le fleuve. Ce système permettait d’empêcher le reflux des eaux de la Loire, et aidait à la régulation du cours de l’Authion. Mais quand les portes étaient fermées pour faire obstacle aux eaux de la Loire, celles de l’Authion s’accumulaient et finissaient par inonder la Vallée.

De plus les portes du pont gênaient la navigation. Le juge des Eaux et Forêts écrivait en 175626 :

“ Ses portes se ferment de haut en bas, elles ont un seuil sur lequel elles appuient à fleur d’eau c’est ce seuil et sa position trop haute qui empêche la communication d’un coté du pont à l’autre. Les voituriers arrivés d’un côté de ce pont sont obligés de décharger les bateaux, d’en passer la charge par dessus la levée et de recharger de l’autre...[?] dans d’autres bateaux, ils sont forcés à ce pénible et couteux travail pour tous les bois de la forêt de Beaufort destinés pour Angers, ou Nantes ”.


D’autre part, les eaux de l’Authion, après le nouveau pont, passaient toujours par la fosse de Sorges et le canal de Champfleury.

Or le canal dirigeait toujours les eaux juste en amont des Ponts-de-Cé, ce qui ne résolvait pas le problème du reflux des eaux.

Dernier problème : on avait négligé de détruire un rocher à l’embouchure du canal de Champfleury. Il était couvert d’un banc de sable apporté par la Loire, ce qui freinait encore l’écoulement des eaux27. Enfin en septembre 1788 des représentants de diverses paroisses du comté se plaignirent que “ des particuliers pour tirer leurs foins de l’autre coté du canal rabattent des terres pour faire passer charrettes et bestiaux qui vont pacager les regains de ces prés sur le rocher. ”28.


Jusqu’au milieu du XVIIIème siècle, les travaux entrepris pour remédier aux inondations de la vallée eurent peu de résultats. Mais dans la seconde moitié du siècle de nouvelles solutions furent proposées.

Nous les verrons plus loin dans la partie centrée sur les communaux, car communaux et projets d’assainissement de la vallée furent intimement liés, au grand regret de la plupart des usagers des communes…Nous pouvons déjà dire que ces projets et leurs débuts d’application ne changèrent rien au inondations avant le début du XIXème siècle.

Sur les rives de l’Authion : la forêt de Beaufort.

La forêt de Beaufort était tout ce qui restait de la grande forêt qui couvrait la vallée avant les défrichements. Elle appartenait entièrement au roi, et non aux comtes ou apanagistes.
La plupart de mes informations proviennent du “ procès-verbal des bois communes et rivières de la grurie de Beaufort ” établi en février 1756 par le juge des eaux et forêts de Beaufort29:

Cette forêt bordait le cours principal de l’Authion sur quatre lieues. Mais il fallait en faire sept pour la parcourir “ au moyen de sa situation moitié d’un coté de la rivière d’Authion, moitié de l’autre, outre qu’elle est fréquemment coupée dans sa largeur par plusieurs petites rivières ruisseaux et boires qui affluent à la rivière d’Authion et qu’on ne peut traverser qu’en bateau à cause de leur profondeur, et de la vase qui en fait le fond. Ces boires closent de toutes parts plusieurs triages ”.

Selon le même document, en 1350 la forêt couvrait encore une demi lieue de large, alors qu’un arpentage de 1667 ne donna que 1912 arpents ¾, divisés entre La forêt de Beaufort (1762 arpents ¾), le bois de Beaufort (112 arpents ½) et le buisson de Chânay près de la Daguenière (37 arpents ½). Ces deux derniers furent peu après défrichés, et 434 arpents distraits de la forêt en 1674. Ces arpents portèrent alors le nom de “ vagues ” de la forêt de Beaufort, et appartenaient au Domaine du Roi.

Les 1328 arpents restants devinrent 1488 arpents suite à un changement de mesure.30

En 1664 Colbert de Croissy évaluait la forêt à 1200 arpents.31 Et une carte de la forêt de 1673 donne 2275 arpents à cette date, “ y compris les vuides et rivières qui en dépendent ”, dont 145 arpents ¾ pour le bois de Beaufort et 48 ½ pour le bois de Chanay.32


En fait ces différences de mesures provenaient du type d’arpent choisi pour mesurer la forêt, et des limites que l’arpenteur lui donnait, en intégrant ou non les cours d’eau, terres enclavées, et chemins.

La “ carte générale de l’ancienne forêt de Beaufort ” dressée vers 1785 est un document très détaillé, qui paraît le plus sûr. Elle donne les chiffres de 1105 arpents pour la forêt en elle même, hors des cours d’eau, boires et chemins.33 Elle concorde avec le “ Tableau de la Généralité de Tours ” de 1762-66 34 qui indique 1100 arpents, soit 728 hectares.

D’après ce document les “ isles et parties de la rivière d’Authion ” ainsi que “ le cours de la rivière ” (cours principal, sauf au Flechet, au sud de Mazé), compris dans la forêt entre les Rosiers et Corné représentaient 78 hectares, ce qui donne une idée de l’étendue des zones plus au moins marécageuses qui bordaient l’Authion.

D’après le procès-verbal de 1756 la forêt était plantée en chênes, frênes et ormeaux abattus tous les 100 ans. Le chêne était vendu en Anjou comme pieux pour la levée, et à Nantes comme pièces de marine, charpente et menuiserie. Le frêne servait en menuiserie, “ bois de tout ” et sabots, l’ormeau en “ charonage ” et sabots. Les “ points et branchages ” en bois de chauffage. L’Authion facilitait la “ vuidange ” (évacuation), rapide des coupes de bois par bateaux.


Une garde difficile.

La forêt était divisée en vingt-trois “ triages ” (secteurs), regroupés en trois bailliages gardés par trois sergents : bailliage du Porteau, de la Garde de Mazé, du Méteil.

La garde en était difficile car elle était “ située entre sept paroisses extrêmement peuplées et à la proximité de cette ville [Beaufort] et de plusieurs grands bourgs qui fourmillent de pauvres gens ”. Quelle tentation pour les habitants de la vallée ! Ils ne disposaient autrement, pour le chauffage, l’artisanat et la construction, que des arbres “ émondables ” bordant les champs, dont les coupes étaient surveillées par les propriétaires et locataires, et des arbres des terrains communaux.

Les vols de bois dans la forêt étaient donc fréquents. Les trois-quarts des procès verbaux de la grurie de Beaufort les concernent. Les voleurs surpris étaient de Mazé, Corné, Les Rosiers, Saint-Mathurin et Beaufort. Ces vols étaient souvent collectifs. Le 11 janvier 1747 un garde vit dix à douze hommes avec de jeunes garçons prendre la fuite, et en reconnut trois de Saint-Mathurin. Deux jours plus tard le même garde vit vingt-cinq personnes couper du bois, et reconnut un meunier de Corné. Certains contrevenants ne se soucièrent même pas de sa présence et continuèrent à emporter du bois ! 35 Le transport des bois volé se faisait souvent sur des bateaux, qui pouvaient porter de lourdes charges, et permettaient d’accéder aux îles de la forêt, pendant les inondations de la mauvaise saison. En décembre 1761 un garde dressa un procès verbal contre deux habitants de Saint-Mathurin, transportant dans deux bateaux des ormes coupés36. Les voleurs agissaient principalement pour leur usage personnel, sauf quelques-uns qui vendaient le bois à des sabotiers ou “ cercliers ”, comme Pierre Patrineau, pêcheur de Saint-Mathurin, qui “ faisoit marchandise et fournissoit même les sabotiers et autres ouvriers des environs (...) dont ils étoient les receleurs dans la nuit même ”37


De plus “ cette forêt joint pour sa majeur partie des deux côtés et des deux bouts les communes du comté de Beaufort (les terres vaines et vagues distraites en 1674 aliénées ou engagées entre deux) et pour le surplus les héritages de quelques particuliers. ”

Des bornes avaient été plantées en 1667 38, lors de l’arpentage, puis en 1674 lors de la distraction d’une partie du sol de la forêt. En 1756 le juge “ grurier ” soupçonne des anticipations sur la forêt : “ Quelques un des détempteurs tiennent des fossés et clôtures, mais nous avons lieu de croire qu ‘ils couvrent des anticipations, sur leur refus à nous représenter les titres de leurs possessions. D’autres se constituent des hayes mortes qui deviennent mobiles au premier mouvement de leur ambition ”

Pour les parties en contact avec les communes “ il n’y a point de clotures ou elles sont mal entretenues ” ce qui laisse le champ libre au bétail.

En 1664 Colbert de Croissy écrivait : “ on y laisse entrer impunément tous les bestiaux qui gâtent tout, et même depuis peu un canton où il y avoit plus de 4000 pieds de jeunes renaissans qui ont été tous mangés ”. 39 En mai 1758 encore, les propriétaires de 160 moutons saisis sur la forêt avançaient pour leur défense l’absence de barrière.40


Colbert de Croissy envisageait déjà de transformer cette forêt en terres cultivées et prés d’un meilleur rendement, dans une vallée ou le prix de la terre était élevé. Sa survivance s’expliquait principalement par les fréquentes inondations de l’Authion, et par les besoins en bois de marine, de bonne qualité dans cette forêt. Quand en 1770 un projet d’aménagement de l’Authion de grande ampleur vit le jour, destiné à réduire fortement les inondations, le défrichement de la forêt fut prévu en même temps, pour mettre les terres de la forêt en cultures ou prairies (voir page 135).


Enfin, les inondations de l’Authion et le cours même de la rivière coupaient la vallée en deux. Elles contribuaient, avec la forêt et les “ communes ” (communaux) du comté, que nous verrons plus loin, à créer une zone de plus faible densité de population au cœur d’une vallée très peuplée.


NOTES DE BAS DE PAGE (WEB)

1 Un ruisseau partait du lieu-dit “ la brèche ”, au pied de la levée, à l’est du bourg de Saint-Mathurin : son origine est facile à déterminer ! Voir le cadastre napoléonien : A.D.M.L.., 3P4/320.
2 A.D.M.L., C 60. Rapport d’expert du 18/2/1788.
3 Partie angevine  : Tableau de la province d’Anjou. Edité par l’abbé Uzureau, page 85 et 127.
4  Mémoire dans lequel on établit les avantages du nettoiement de la rivière d’Authion ... 1783. Anonyme mais attribué à Aveline de Narcé. A.D.M.L, C 42.
5 A.D.M.L., O-191. Chiffres repris dans une délibération de la municipalité des Rosiers opposée au projet de Bétourné, mais ne contestant pas les chiffres, le 1/5/1816. J’ai comparé ces chiffres à la superficie des communes concernées. Pour Saint-Mathurin, en l’absence de chiffres sûrs, et en me basant sur le cadastre de 1808-1810 (A.D.M.L., 3P4/320/1), j’ai estimé à 400 hectares la superficie prise sur Saint-Mathurin lors de la création de La Ménitré. Saint-Mathurin aurait donc compris 2400 hectares, l’inondation touchant 1115 hectares. Ce qui est encore inférieur à la surface envahie lors d’une crue exceptionnelle de l’Authion comme celle de 1910, qui couvrit plus des deux tiers de la commune.

6 Voir la carte de Cassini (A.D.M.L., 1 Fi 509. La représentation des cours d’eau est très approximative), et surtout la carte de la forêt de Beaufort dressée vers 1785 : A.D.M.L., 1 Fi 482
7 A.D.M.L., C320.Réponse au questionnaire de l’Assemblée provinciale. Décembre 1787.
8 François Lebrun. Les hommes et la mort en Anjou aux 17e et 18e siècles. Pages188 à 191.
9 A.D.M.L., 1-L-272 : 17 nivose an 6 (6 janvier 1798) Réponse au questionnaire du commissaire près l’admin. centrale du département.
10 A.D.M.L., 11 Fi 63
11 A.D.M.L., 1 Fi 482.
12 A.D.M.L., C42. Observation sur les communes de Beaufort et sur les travaux de l’Authion, attribué au comte d’Essuile. Il écrit “ d’autres vices dans le cours de cette rivière, doivent être détruits. Elle a d’anciens couloirs, d’anciens fossés presque comblés, par lesquels son eau se repand au loin, et inonde tout. On doit les fermer contre cette rivière même, par le haut, en laissant le bas libre. Il [ Le comte d’Essuile] en a fait fermer 4 dans la foret de Beaufort, par d’épaisses levées ; à l’instant tous les terreins des paroisses de St Mathurin et de La Marsaulaye, déjà inondés, ont été découvertes et mises à sec ”.
13 “ Remarques de M. le Comte d’Essuile ” dans  Mémoire dans lequel on établit les avantages du nettoiement de la rivière d’Authion...etc. 1783, attribué à Aveline de Narcé. A.D.M.L., C 42
14 Roger Dion. Le Val de Loire. Etude de géographie régionale. page 195.
15 Archives de Beaufort, DD11 (ex DD7). Mémoire de M. de Narcé joint au procès-verbal d’assemblée des communautés du comté le 18/9/1770. Arguments repris dans une lettre à l’intendant de 1788 par plusieurs paroisses du comté au sujet de la submersion d’une partie des prés à Brain, Andard, Trélazé. Ecriture de M. de Narcé. Parmi les signatures le syndic de La Marsaulaye. (A.D.M.L.,C 42 ).
16 A.D.M.L., C 42
17 A.D.M.L., 8/B/37
18 François Lebrun, op. cit. page 66.
19Chronique de Denys Chevallier curé de Saint-Aubin des Ponts-de-Cé 1703 à 1725, A. H. 1916-17, p.578-582 : “ Le samedi 29 mai 1723, on a commencé à ouvrir un nouvel Authion dans la prée de Champ-fleury pour le continuer jusqu'à la fosse de Sorges en droite ligne (...) Le 18 septembre 1723, on a fini le nouvel Authion depuis l’embouchure de la Loire jusqu'à la fosse de Sorges ”
20 Chronique de Denys Chevallier, op. cit. “ le 15 novembre 1723 on a commandé les paroisses de la Vallée et les autres depuis Beaufort jusqu'à St-Augustin-les-Angers et les deux paroisses des Ponts-de-Cé pour aller par corvée creuser l’Authion, à commencer depuis Sorges en montant. Chaque paroisse devait se tiercer et fournir deux journées par semaine. ”
21 François Lebrun, op. cit. page 67 note 165.
22 A.D.M.L., 8/B/37 . 1744 nouvel Authion et Communes de Corné.
23 Des ruisseaux appelés le “ vieil Authion ” existent encore au sud de Corné, à Saint-Clément-des-Levées et à Saint-Clément-de-la-Place (cartes I.G.N. au 1/25000e, 1622est [Longué], 1622ouest [Mazé], 1623E [Saumur] )
24 Le roi René fit construire un pont à Sorges. (Marché conclu avec le maître d’œuvre le 21/1/1457). Début 18e, un bac appartenant au roi existait à l’embouchure de l’Authion. (Célestin Port Dictionnaire historique… article “ Sorges ”). En 1788 les ruines de l’ancien pont, encore visibles, et l’ancienne levée, servaient de frontière à la paroisse de Sorges et aux communes du comté. (A.D.M.L., 1 Hs/B/147. Documents de l’Hôpital St Jean d’Angers : contestation en 1788 sur l’appartenance des terres entre l’ancienne et la nouvelle levée.)
25 A Sorges (maintenant Trélazé) une petite pyramide fut construite autour de 1733 pour commémorer l’achèvement de cette digue. Célestin Port “ La pyramide de Sorges ” dans Questions angevines.
26 Archives de Beaufort DD6 (ex DD5), “ Procès-verbal des bois communes et rivières de la grurie de Beaufort ” 1756.
27 A.D.M.L., C 42 “ Remarques de M. le Comte d’Essuile ” dans Mémoire dans lequel on établit les avantages du nettoiement de la rivière d’Authion... etc. 1783.
28 A.D.M.L., C 42. Lettre déjà citée adressée à M. d’Aine en 1788 par diverses paroisses du comté au sujet des inondations de l’Authion.
29 Archives de Beaufort, DD6 (ex DD5).
30 Archives de Beaufort, DD6 (ex DD5). 110 arpents par canton, 100 chainées par arpent, 25 (arpent d’Anjou) puis 22 (arpent d’ordonnance, des eaux et forêts) pieds par  chainée (perche carrée), 12 pouces par pied.
31 Rapport sur l’Anjou. Charles Colbert de Croissy 1664, en partie publié dans Archives d’Anjou. de Marchegay, page 147. C’est une simple évaluation, l’arpentage ayant eu lieu en 1667.
32 Musée Joseph Denais, Beaufort-en-Vallée. Arpent d’ordonnance de 22 pieds. La carte en elle-même comporte de grossières erreurs.
33“ 1859 arpents 60 perches, scavoir : - L’ancienne forêt entre les distances des bornes établies dans le procès verbal de bornage  1105 arpts 84 perches [perches de 25 pieds, donc arpent d’Anjou de 0,6593 ha.] - Les isles et parties de la rivière d’Authion  60 arpts 34 per.- Le cours de la rivière d’Authion  58 arpts 23 per. - Les vagues qui en ont “ été distraites en différents temps ” : 581 arpts 67 per.- Les terreins et chemins publics enclavés dans la forêt et les vagues  47 arpts 14 per.- Le viel authion de la boire de Gondouine et une partie de la boire de la Cottière le tout enclavé dans la forêt et les vagues  5 arpts 12 perc.- Les parties basses de la boire du bœuf vaillant joignant le Flechet 1 arpt 26 per. ”. A.D.M.L., 1Fi 482. 15 plans reliés à différentes échelles.
34 Partie angevine publiée sous le titre Tableau de la province d’Anjou. par l’abbé Uzureau, page 133.
35 A.D.M.L., 8 B 46. Procès-verbal de Joulain, des 11 et 13 janvier 1747.
36 A.D.M.L., 8 B 48. Procès-verbal du 8 décembre 1761.
37 A.D.M.L., 8 B 48. Procès-verbal du 14 février 1761, interrogatoire en août.
38 A.D.M.L., 8 B 37. juillet 1667, Jean Le Feron commissaire député pour la réformation générale des Eaux et Forêts en Anjou, Touraine... ordonne aux riverains de la forêt de fournir les bornes et de les installer en présence de l’arpenteur.
39 Rapport de Colbert de Croissy dans Archives d’Anjou de Marchegay page 147.
40 A.D.M.L., 8 B 47. Requête du 16 mai 1758. Des saisies sont faites régulièrement au 18e siècle sur le bétail . De 1744 à 1754, 7 chevaux, 27 vaches, 3 bouvards et un taureau furent saisis dans la forêt et vendus. On parlait dans ce cas d’ “ abroutissement ”. (A.D.M.L., 8 B 46 et 8 B 47.)